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Page:La Revue du Mois, tome 2, 1906.djvu/173

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LA REVUE DU MOIS

Pour comprendre l’origine de cette illusion, il faut avoir présentes à l’esprit les conditions qui déterminent les distances auxquelles les objets nous paraissent se trouver de nous. Or, la distance ou profondeur apparente d’un objet inconnu dépend chez l’homme normal de deux facteurs principaux : de la convergence des axes optiques des yeux[1] et de la parallaxe binoculaire, ou, comme on l’appelle encore, stéréoscopique.

Supposons deux points situés dans le plan médian de la tête, l’un à 1 mètre et l’autre à 3 mètres de nous ; pour passer de la fixation binoculaire du plus éloigné à celle du plus rapproché, nous sommes obligés de faire croître la convergence des axes optiques de nos deux yeux et, pour cela, de faire tourner nos yeux en sens contraire, l’œil gauche vers la droite et l’œil droit vers la gauche ; inversement si nous passons du point le plus rapproché au plus éloigné. Or ces mouvements de nos yeux donnent lieu à des sensations, que ce soient simplement des sensations des muscles des yeux et de leurs tendons, ou qu’il s’ajoute aux précédentes des sensations cutanées des paupières (les paupières sont influencées, en effet, comme on le constate aisément, par les mouvements des yeux) ; et, lorsque le changement dans les sensations ainsi produites devient assez grand, nous pouvons percevoir ainsi, par le seul moyen de la convergence, une différence de distance entre deux points[2]. En outre, remarquons que, pour un angle déterminé de convergence, il se produit des sensations déterminées qui peuvent nous renseigner sur la distance d’un point unique par rapport à nous, ou, comme on dit quelquefois abréviativement, sur la distance absolue de ce point. Ainsi, si nous observons à 0m,50 de nous, dans l’obscurité, un point lumineux, nous apprécions assez exactement par les seules sensations de convergence la distance à laquelle il se trouve de nous, et nous pouvons, sans tâtonnements et sans trop d’erreur, le toucher avec le doigt.

Par parallaxe binoculaire ou stéreoscopique on entend la différence qui peut exister entre les deux images d’un objet ou d’un groupe d’objets d’un œil à l’autre, différence qui tient

  1. Ou, plus exactement, de la convergence des lignes visuelles, dont les directions diffèrent légèrement de celles des axes optiques. Ces lignes sont les droites allant du point fixé aux deux foyers.
  2. Le rôle de l’accommodation, qu’on pourrait songer à faire intervenir également ici, est très probablement, d’après les résultats des recherches les plus récentes sur la question, sans importance ou même nul.