Page:La Revue du Mois, tome 2, 1906.djvu/201

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
178
LA REVUE DU MOIS

compétentes en astronomie, on critiqua cette explication, tout en reconnaissant son ingéniosité, parce qu’elle était trop habile et artificielle — trop nouvelle.

Néanmoins il est juste de reconnaître que ses adversaires furent d’une grande courtoisie et d’une extrême bonne foi — si l’on en excepte, d’une manière générale, les Italiens, qui se « soulèvent » contre son travail, sous l’impulsion principale de Eustache de Divinis, car « … le signor Eustachio veut à l’usage du pays que l’on lui croye aveuglément sans contredire sous peine d’être fulminés », écrit P. Guisony[1] le 1er août 1660. De Divinis fut, en effet, le seul polémiste important contre Chr. Huygens.

L’existence de cette bande externe et peu réfléchissante ne paraît pas grandement préoccuper, tandis que les admirateurs eux-mêmes du système ne laissent pas d’être assez troublés, quelque peu inquiets sur la présence de cet anneau suspendu, comme on le voit surabondamment dans la correspondance. Et leur scrupule est assez curieux : certainement ils admettent bien que, si l’on eût pu construire un pont en anneau tout autour de la terre, puis retirer les échafaudages, l’arche se tiendrait d’elle-même en vertu des lois de la pesanteur et serait ainsi suspendue alentour de notre globe ; ce n’est pas, en un mot, la stabilité du système qui les arrête, mais bien son origine et les conditions dans lesquels il a pu se trouver réalisé — conditions qui se sont éclaircies depuis. Huygens reçoit l’approbation de Riccioli et entretient une nombreuse correspondance avec Thévenot[2], R. Moray[3]

Il est un point sur lequel la discussion porta d’une façon exclusivement scientifique Huygens avait évalué que les dia-

  1. Pierre Guisony, médecin d’Avignon, s’occupait beaucoup de physique expérimentale ; il devint un correspondant assidu de Huygens et a publié :

    Epistolica Dissertatio de Anonymo libello, ubi potissimum eventilatur principiorum chymicorum hypothesis. Auct. P. Guisonio, Avenio, 1665/

  2. Melchisedec Thévenot naquit vers 1620 à Paris et mourut à Issy le 29 octobre 1692. Il était grand voyageur, avait des relations partout et rassembla une bibliothèque très intéressante, dont plusieurs manuscrits grecs et latins se trouvent actuellement à la Bibliothèque de Leiden. Il continua les réunions qui avaient lieu chez Monmor et publia diverses relations de voyages.
  3. Sir Robert Moray (Murray), fils de Sir Robert Moray de Craigne, issu d’une ancienne famille d’Écosse, naquit en 1610 et mourut le 4 juillet 1673 à Londres, où il fut enterré dans l’abbaye de Westminster. Il passa sa jeunesse en France, où, son éducation terminée, il gagna les bonnes grâces du Cardinal de Richelieu. En 1660 il entra au Privy-Council et fut le premier président de la Société Royale, dont il avait été un des fondateurs.