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L’ÉVOLUTION

DU PROTECTIONNISME[1]



De plus en plus, le protectionnisme s’implante, s’étend chez toutes les nations, englobe toutes les industries, et passe à l’état de régime, au point qu’aucun peuple ne saurait abaisser brusquement ses tarifs sans provoquer chez lui-même une crise redoutable, peut-être irréparable.

I

Et non seulement, il devient impossible de réagir contre la tendance protectionniste, mais il semble qu’il ne faille même pas songer à la prévenir dans ses nouveaux effets, dans ses exigences toujours croissantes : un tarif en entraîne un autre ; le protectionnisme conduit à la contre-protection ; avez-vous protégé les charbons et les fers ? Vous voilà contraints, par ricochet, de protéger toutes les industries qui consomment des charbons et des fers. On répondra peut-être qu’il convient — et qu’il est possible — de supprimer les tarifs relatifs aux matières premières indispensables à l’industrie. « Free raw materials » disent les Yankees de la « Tariff league » ! Sans rechercher pour le moment quel bouleversement produirait dans la production charbonnière et métallurgique française — par exemple — la suppression des tarifs qui grèvent « le pain » de l’industrie, constatons que cette suppression brusque semble incompatible avec le maintien du reste de l’échafaudage protectionniste : pour extraire et traiter le minerai, ne faut-il pas toute une machinerie ? Or la protection des matières ouvrées accroit le

  1. Extrait d’un volume qui paraîtra sous ce titre : Les merveilles du protectionnisme.