Page:La Revue hebdomadaire, Octobre 1908.djvu/228

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cingler le ventre arrondi du petit compère. Puis le hennissement aigu de Lapin s’en vint jusqu’à eux à travers le terrain.

— Je ne peux pas faire toute la besogne, criait-il.

— Jouez, ne parlez pas, hennit le Chat Maltais.

Et tous les poneys surexcités se tortillèrent, tandis que les soldats et les grooms empoignaient les barrières et se mettaient à hurler. Un poney noir muni d’œillères avait mis le grappin sur le vieux Benami, et s’efforçait par tous les moyens en son pouvoir de le gêner. On voyait Benami encenser et faire claquer sa lèvre supérieure.

— Attention à la culbute, dit Polaris. Benami commence à se fâcher.

Le jeu ondoya de haut en bas, de goal à goal, et les poneys noirs prirent confiance en sentant qu’ils avaient de meilleures jambes que les autres. La balle sortit d’une petite mêlée, et Benami ainsi que le Lapin la suivirent, Faiz Ullah trop content d’avoir la paix un instant.

Le poney aux œillères noires arriva comme un faucon, avec deux des siens derrière lui, et l’œil de Benami brilla comme ils disputaient ensemble de vitesse. La question était de savoir lequel des deux poneys céderait la place à l’autre, chacun des cavaliers parfaitement consentant à risquer une chute pour la bonne cause. Le noir, que ses œillères avaient presque rendu fou, se fiait à son poids et à sa fougue ; mais Benami, lui, savait comment l’employer, son poids, et comment la régler, sa fougue. Ils se rejoignirent, et l’on ne vit plus que poussière. Le noir gisait sur le flanc, hors d’haleine. Le Lapin était à cent mètres de là, en haut du terrain, avec la balle, et Benami se trouvait assis. Il avait glissé sur une longueur de près de dix mètres, mais il avait eu sa revanche et resta