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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/170

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vous devez éprouver quelques remords, c’est de m’avoir trompée.

ANGÉLIQUE

Ciel ! Qu’entend-je ? Moi, vous tromper ! Votre discours me déchire bien plus que mon pucelage perdu. Que la foudre m’écrase, si j’ai eu, si j’aurais jamais la moindre idée de vous duper… Mais expliquez-vous, je vous prie, je ne puis revenir de ma surprise.

MARTHE

Vous avez perdu votre pucelage, mademoiselle ?

ANGÉLIQUE

Hélas ! osez-vous me le demander, et d’un air si moqueur ?

MARTHE

Si j’ose ?… On ne peut perdre ce qu’on n’a pas… Vous m’avez toujours dit que vous vous montrez telle que vous êtes ; que votre belle bouche n’est pas faite pour déguiser, pour trahir les sentiments de votre cœur ; que la sincérité a toujours dirigé vos discours et vos actions ; que vous avez la fausseté et la dissimulation en horreur. Voilà, mademoiselle, en quoi vous m’avez trompée.

ANGÉLIQUE

Mais je ne vous comprends pas encore. Non, je ne me suis jamais permis aucun déguisement ; si j’ai marqué quelque penchant à feindre avec les hommes, c’est le fruit de vos leçons ;