Page:La Rochefoucauld - Œuvres, Hachette, t2, 1874.djvu/512

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son ancien ministre l’emportèrent sur le nouveau, en ce qui touchait le rappel et le rétablissement de quelques-uns de ceux qu’on avait bannis et privés de leurs charges, ce fut si manifestement sans y avoir fait de réflexion, qu’à peine y avait-elle acquiescé qu’elle s’en repentit.

Il est vrai qu’avec tout cela je fus le dernier à qui elle ôta l’espérance ; et quoique, à bien prendre les choses, on pût véritablement dire que je n’étais de rien, elle disait encore à ceux qui gouvernaient qu’il n’y avait rien dont je ne pusse être. Mon zèle et ma générosité étaient les modèles qu’elle leur proposait, et voulant que le Cardinal et moi fissions amitié, elle voulut encore que j’en fisse les lois, et qu’il s’y soumît comme à une épreuve infaillible de la pureté de ses intentions. Je me joignis donc à lui, avec dessein de ne le quitter de ma vie, s’il ne se départait de ses véritables devoirs, ou s’il n’essayait de me faire départir des miens. Je ne craignis point d’en faire ma déclaration à ceux de qui je croyais être le plus aimé, bien que ce fussent ceux-là mêmes auxquels il était le plus odieux. Nous eûmes sur ce sujet des contestations, et fort obstinées et fort inutiles ; si je ne pus les faire entrer dans mon sentiment, ils ne me firent point aussi entrer dans le leur. Ce n’est pas que leur aversion n’eût pour fondement l’opinion qu’ils avaient de son impuissance à se porter au bien, et les événements n’ont que trop souvent répondu à leurs