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Page:La Roncière - Nègres et négriers, 1933.djvu/224

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LA CROISADE NOIRE

Un Pierre L’Hermite se leva pour déclarer la guerre à l’esclavage et prêcher la croisade noire à travers les capitales de l’Europe. Primat d’Afrique, il était paré de la pourpre romaine. Dans la cathédrale Sainte-Gudule à Bruxelles, la voix du cardinal Lavigerie retentit, terrible. Noirs ensevelis à la mort de leur maître, femmes brûlées vives pour satisfaire le caprice de quelque roi de l’Ouganda, estropiés dont les mains avaient été coupées pour que fût plus doux, frappé par leurs moignons, le son du tambour, il n’était atrocité qu’il ne révélât à son auditoire horrifié. Il fut entendu. En 1888, l’œuvre antiesclavagiste était fondée.

Elle avait à lutter non seulement contre l’esclavage, mais contre le cannibalisme. En 1893, Mgr Augouard, évêque de l’Oubanghi, signalait l’abominable trafic qui se faisait sur les rives du fleuve. On amenait les esclaves sur le marché : les clients marquaient à la craie la partie du corps qu’ils choisissaient, bras, jambe, poitrine. Après quoi, on coupait la tête des pauvres diables, qui étaient débités comme de la viande.

— Tu n’en manges pas, disait un chef anthropophage à un voyageur.

— Non, mille fois non.

— Tu as tort : vous autres blancs, vous ne connaissez pas ce qui est bon.