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Page:La Roncière - Nègres et négriers, 1933.djvu/69

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rond devant la maison mortuaire, en faisant, pour se désaltérer, de fréquents appels à des rasades d’eau-de-vie.

Le cadavre, lavé avec une décoction de manioc, est assis, la main droite tournée vers l’Orient ; enduit au préalable d’une croûte épaisse de terre rouge, il est paqué, c’est-à-dire enveloppé de tout ce qu’il a de plus précieux : corail, étoffes d’Europe, indiennes, drap et soieries. Plus le défunt est riche, plus sa dépouille est informe. Le corbillard qui traîna, vers sa maison mortuaire, un de ces grands personnages, avait vingt pieds de long, quatorze de haut et huit d’épaisseur : une petite tête en émergeait, qui figurait le défunt. Pour le traîner jusqu’au sépulcre, les charpentiers européens durent construire un diable, et un négrier prêter des grelins et des haussières énormes. Cinq cents hommes s’attelèrent à la pesante machine et mirent quatre jours à franchir une distance d’une lieue. Sur la tombe furent plantées deux magnifiques défenses d’éléphant.

Qu’est devenue la capitale du roi marseillais Granot ? Une bourgade en ruines. Cette belle ville de 40.000 habitants qu’était alors San Salvador, n’en comptait plus que 700 il y a un demi-siècle, exemple saisissant de l’effroyable saignée qu’avait faite en Afrique la traite des nègres. Le P. Rinchon évalue à treize millions deux cent cinquante mille esclaves le chiffre des malheureux qui prirent, captifs, la route de l’Amérique par les ports de Loango, Malimba, Cabinda, Pinda, Boma, Mussula et Ambrizette !

À Paris, s’était fondée en 1748, la Société d’Angola