Page:La Saga de Gunnlaug Langue de Serpent, trad. Wagner, 1899.djvu/33

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aux savantes investigations de G. Vigfusson[1], la date de la plupart des faits historiques sur lesquels reposent les sagas est établie avec précision et certitude. Or, ces faits constituent le fond véritable, on pourrait dire l’origine de la saga ; car les événements de l’histoire, que l’auteur se plaît parfois à dépeindre sous des couleurs ravissantes empruntées à sa poétique imagination, se racontent dès le lendemain du jour où ils se sont accomplis ; les récits commencent à circuler, s’amplifiant, se chargeant d’épisodes nouveaux, les uns gais et pittoresques, les autres émouvants et terribles, et, au bout d’un temps qui varie selon la grandeur et la réputation des héros et selon l’importance des faits, ils franchissent, en évoluant incessamment, des distances considérables et se répandent dans des contrées parfois très éloignées du pays d’origine.

Ce n’est pas encore la saga, ce n’en est que la matière ; elle est toujours en voie d’élaboration ; elle naît le jour où un individu, mieux doué ou mieux au courant des traditions, s’avise de recueillir et de rattacher les uns aux autres, parfois par les liens de la fiction, les chaînons épars de cette longue et vaste énumération d’exploits retentissants ou de faits d’ordre intime, de coordonner de la façon la plus naturelle toute une série de récits et d’enformer un tout connexe, une histoire complète et achevée.

C’est la phase primitive, la première étape de formation. La saga existe, mais uniquement à l’état de tradition verbale. Bien que les grandes lignes en soient définitivement tracées par la main de l’artiste, elle ne s’arrête pas dans son développement. Repo-

  1. Um timatal i Islendinga sögum dans le Safn til sögu Islands og íslenskra bókmenta ad fornu og nyju. Kaupmannahöfn, 1856-79.