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RÉDACTION ET ADMINISTRATION Rond-Point de Plainpalais, 1. — Genève. La Semaine Littéraire ne répond pas des manuscrits qui lui sont adressés. |
VENTE AU NUMÉRO |
causerie littéraire. Les débuts de la littérature réaliste en Allemagne |
Félix Schrœder. | |
second séjour au Monténégro. V. Cettinje |
William Ritter. | |
mon cottage. Croquis humoristiques (Fin). |
J. Habberton. | |
revue politique. Attentat de Lyon |
Gaspard Voilette. | |
sur l’alpe en hiver. Vers |
Henri Warnery. | |
à travers l’art et la vie. Les publics de théâtre |
Henry Bordeaux. | |
échos de partout : Une lettre de Gottfried Keller. — Un peu de musique. |
Chanteclair. | |
modes d’été |
Franquette. |
CAUSERIE LITTÉRAIRE
I
Tandis que sous des noms divers et avec des fortunes différentes un esprit nouveau plus soucieux de réalité s’imposait pour ainsi dire fatalement à l’art contemporain et envahissait toutes les grandes littératures de l’Europe, l’Allemagne semblait seule y rester réfractaire et son importance littéraire diminuait à mesure que croissait son importance politique. Aussi bien ne s’occupait-on plus beaucoup en France des écrivains d’outre-Rhin, et M. Th. Droz a-t-il pu déclarer ici même récemment que jusqu’à l’apparition des dramaturges Sudermann et Hauptmann le nouvel empire allemand n’avait rien produit de remarquable en littérature. Un essai de rénovation littéraire avait pourtant été tenté ; et si le grand public allemand y est resté assez indifférent, ce n’est pas la faute des panégyristes convaincus et enthousiastes qui ont entrepris de célébrer la nouvelle littérature et qui se sont justement plaints en termes pathétiques de cette indifférence du public.
« Les historiens de l’avenir, écrit l’un d’eux[1], qui s’occuperont de notre littérature actuelle seront surpris de voir qu’une si profonde transformation dans la vie intellectuelle de notre nation ait pu s’accomplir avec si peu de bruit. » Et ce même critique poursuit un long parallèle entre le mouvement littéraire qui a commencé à se dessiner vers 1885 et celui qui, à la fin du siècle dernier, ouvrit la grande ère de la littérature allemande.
S’il y a certainement beaucoup d’exagération dans l’optimisme de M. Steiger, on ne peut nier toutefois que depuis le cri de guerre poussé par M. Bleibtreu, dans une brochure au titre retentissant[2], il ne se soit produit en Allemagne un essai de renaissance littéraire digne d’attention. Cette renaissance a trouvé aussi un historien enthousiaste en la personne de M. Merian qui a tracé un rapide tableau de la nouvelle littérature dans une brochure écrite avec beaucoup de clarté, de netteté et d’entrain[3].
Mais c’est M. Steiger dont l’exposé a le plus de portée, car il ne se contente pas d’apprécier les résultats obtenus, il cherche à indiquer les causes morales et sociales qui nécessitaient une révolution littéraire et il assigne à la littérature sa tâche dans la grande lutte de l’avenir contre le passé, dans la crise que traverse l’humanité et dont l’importance est si grande d’après lui que « on peut tout au plus y comparer l’apparition du christianisme. »
Si les jeunes écrivains dont MM. Merian et Steiger se sont faits les avocats n’ont pas encore produit d’œuvre qui justifie entièrement les prétentions émises en leur nom, leur histoire me paraît cependant digne d’être racontée, quand ce ne serait qu’à cause des rapports qu’elle présente avec les mouvements littéraires des pays voisins.
En 1871, quelques patriotes naïfs espéraient qu’après avoir enfin conquis son unité, l’Allemagne allait être subitement dotée d’une littérature nouvelle, expression spontanée de la vie nationale. Hélas ! le jeune empire ne trouva pour célébrer son avènement que des rhéteurs assez creux et la vie nationale eut pour interprètes de