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LA TRADITION


LA LÉGENDE DE SAINTE MARIE L'ÉGYPTIENNE D'APRÈS UNE RÉCENTE ÉTUDE DE M. TH. DE PUYMAIGRE (1).

Marie L'Egyptienne a joui d'une grande célébrité au moyen-âge. Suivant Alban Butler (2), sa vie fut écrite d'après la relation d'un contemporain de Zozime qui avait vu la sainte. Cette oeuvre fut probablement le thème sur lequel Hildebert, évêque du Mans, composa au XIe siècle un poème latin : ce fut aussi sans doute le point de départ du récit de Jacques de Voragine (3).

Il y a quelques années, le marquis de Pinal découvrit, dans la bibliothèque de l'Escurial, le manuscrit d'un poème espagnol de Marie l'Egyptienne, dont M. le comte de Puymaigre rapporte la rédaction aux premières années du XIIIe siècle. L'auteur anonyme de ce poème débute par une apostrophe directe à ses auditeurs il en est presque toujours de même dans nos anciens fabliaux


« Ecoutez, hommes, une histoire dans laquelle il n'y a que vérité : écoutez-la de cœur pour avoir pardon de Dieu. Elle est toute faite de vérité, il n'y a rien de faussetė. Tous ceux qui aiment Dieu écouteront ces paroles, et pour ceux qui de Dieu n'ont souci, cette parole sera dure. D'une dame que vous avez ouï nommer, je veux vous conter toute la vie, de sainte Marie Egyptienne qui fut une dame très belle et de son corps très fière. » Après quelques réflexions morales, l'auteur arrive à son sujet. Marie, dès sa jeunesse, s'abandonna à tous ses mauvais penchants. Pour être plus libre dans ses vices, elle quitta son père et sa mère, et partit seule emportant un petit oiseau qui chantait l'amour hiver et été. Elle arriva à Alexandrie. . Elle fit prévenir tous les fils de bourgeois pour qu'ils la vinssent ad. mirer. Eux avaient grande passion pour elle, parce qu'elle était comme une deur. Tous lui faisaient la cour pour obtenir son amour (por el su cuerpo acabar). Elle les recevait volontiers pour qu'ils fissent à leur plaisir. A boire, à manger, dans la folie elle passait ses jours et ses nuits. (1) Cte Th. de Puymaigre, Les Vieux Auteurs castillans, p. 250 et suiv., Paris, A. Savine, 18, rue Drouot, 1888. (2) Trad. par Godescard, Vie des Pères, des Martyrs et des principaux Saints, T. III, p. 283. (3) Légende dorée, et Vie des Saincts et Sainctes qui Jésus-Christ aymèrent. Paris, MDXLVI, rue Sainct-Jacques, à l'enseigne de l'Eléphant, in-8.