dans la sphère non matérielle (arūpa), le vijñāna ne cause pas nāmarūpa, mais seulement nāman[1].
6. Que faut-il entendre au juste par nāmarūpa ? Ce terme, dont les origines védantiques sont évidentes[2], désigne probablement l’individu dans sa totalité spirituelle et matérielle, conçu comme un aggrégat sans unité substantielle[3]. Cependant la seule définition scolastique que je rencontre dans le canon[4] (Saṃ. ii, 3, Majjh. i, 53) semble séparer le vijñāna du nāmarūpa : « Par rūpa, on entend les quatre éléments (terre, etc.), et le rūpa qui dérive des quatre éléments »[5] : il s’agit ici du rūpa dérivé, c’est-à-dire du corps, y compris la matière subtile qui constitue les organes des sens[6]. — « Par nāman, on entend sensation, notion ou nom, volition, contact, attention » (vedanā, saṁjñā, cetanā, sparśa, manasikāra, voir ci-dessous), c’est-à-dire des données d’ordre spirituel qui se rapportent au vijñāna comme à leur cause ou à leur support, et dont, à son tour, le vijñāna dépend.
La scolastique postérieure hésite[7]. Tantôt, et ceci revient à la
- ↑ Voir Vibhaṅga, 138 ; AKV., Ms. Burnouf 454 a ; Hastings’ Encycl. art. Cosmology, p. 137.
- ↑ Sens védantique : ce qui caractérise les objets particuliers, leur forme et leur nom. — Voir Kern, Geschiedenis, I, 335 ; Oldenberg, Buddha5, 262 ; Rigveda-Noten zu iii, 38.7 ; V, 43.10 ; Arch. für Rel. Wiss., 1910, 584 (Suttanipāta 1074) ; Senart, Mél. Harlez, 286, qui pense que ce terme, ici, « ne peut essentiellement représenter que le rūpa », matière. — On trouvera des étymologies de nāman et de rūpa dans Madhyamakavṛtti, 343, 544 et Muséon, 1901, 195.
- ↑ Voir Bigandet, II, 224, cité par Kern, I. 341. — Le nāmarūpa est un « compound » (samghāta) de deux compounds, rūpa et nāman (qui s’appuient l’un sur l’autre), Nettipakaraṇa, 28 ; all physical and mental phœnomena » (Kern).
- ↑ Définition qui demeure dans la scolastique ; voir les explications Vibhaṅga, 147, 114, 148.
- ↑ D’après les théoriciens pālis (Kathāvatthu, vi, 8) les éléments sont invisibles, nous ne connaissons que des dérivés des éléments. Même doctrine chez Dignāga.
- ↑ Voir Hastings’ Encycl. art. Death. — Un commentaire de Nāgārjuna (Akutobhaya) remplace nāmarūpa par kāya-nāman.
- ↑ Voir Abhidharmakośa, iii, 30 ; Vibhanga, p. 136, Dhammasaṅgaṇi, § 1309, Warren, p. 184, Śikṣāsamuccaya, p. 222, JRAS, 1905, p. 400 etc.