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supprimé… » (1). Les notions de condition nécessaire, de coefficient et de cause génératrice, sont confondues dans cette définition.

Elle soulève un petit problème d’exégèse. Pourquoi le Bouddha exprime-t-il sa pensée de deux manières en deux phrases parallèles (paryāyā) ? Pourquoi parle-t-il de l’existence (hoti) avant de parler de la naissance (uppajjati) ?

D’après l’Abhidharmakośa (2), le second paryāyā (« de l’apparition de ceci… ») a pour but 1. de préciser (avadhāraṇārtham), car on pourrait comprendre le premier dans le sens de : « ceci étant [et telle autre chose étant aussi], cela est » ; 2. d’indiquer la succession des membres (aṅgaparaṃparā : « le membre avidyā étant, le membre saṃskāras est ; et de l’apparition de ce membre saṃskāras apparaît cet autre membre vijñāna » ; 3. d’indiquer la janmaparaṃparā (3) ; 4. d’indiquer la nature de la causalité (pratyayabhāva) qui est immédiate pour le premier paryāyā et médiate pour le second : la causalité est immédiate lorsque des saṃskāras vicieux sont produits en conséquence immédiate de l’ignorance, médiate lorsque les saṃskāras sont bons ; en outre, l’ignorance est cause immédiate (sākṣātpratyaya) des saṃskāras, cause médiate (pāramparyeṇa pratyaya) des vijñānas, etc. Il y a d’autres explications : 1. Vasuvarman croit que le premier paryāyā a pour but d’écarter la doctrine de non causalité (ahetuvāda), le second la doctrine d’une cause sans origine, permanente (4), Puruṣa ou Prakṛti [; mais alors le premier paryāyā est inutile] ; 2. certains théoriciens (vādinas) admettent l’existence d’un ātman, support de l’enchaînement des causes. Il faut donc entendre le Pratītyasamutpāda dans le sens suivant : « ce qui apparaît par l’apparition de telle chose donnée, cela est par

(1) Voir par exemple Udāna, 1,i ; Mahāvagga, i, 1, 2 ; Saṃ., ii, 28, 65 ; Majjh., i, 262, ii, 32, iii, 63 ; Mahāvastu, 11, 285 ; Madhyamakavṛtti, p. 9. — Critique au point de vue de la vérité absolue, ibid., p. 86.16.

(2) Ms. de la Soc. As., fol. 233 b.

(3) naissance suit existence (?).

(4) Pour cette thèse que le permanent (nitya) ne peut avoir d’effet, ne peut être cause, voir Sarvadarśana (Calcutta, 1858), p. 9, et notre commentaire dans Muséon, 1901, p. 64.