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tomba sous les coups de son provocateur. Le lendemain, Naples apprit que le premier ministre avait été assassiné.

Les deux amis furent soupçonnés et conduits devant le roi. Le prince Alphonse, interrogé le premier, dit au souverain :

— Sire, je détestais Sorrente et le duc de Palerme, je me suis vengé.

Le prince royal voulut justifier son ami. Celui-ci lui jeta un regard qui voulait dire : Laisse-moi accomplir mon sacrifice,

Le conseil suprême condamna mon maître à la mort. L’amitié et l’amour le sauvèrent du supplice. Retirés aux environs de Portici, à la Torre del Greco, nous échappâmes aux recherches incessantes qu’occasionna notre fuite.

Un jour cependant, le prince royal dit à mon maître.

— Tu ne peux rester plus long-temps en ces lieux ; demain un navire part pour la France : ta sûreté exige que tu te rendes à son bord.

— Et Maria, faudra-t-il l’abandonner ?

— Ce soir vous serez unis.

Et lorsque les dernières lueurs du jour s’endormirent dans les flots, nous nous rendîmes à un ermitage situé au bord de la mer et au pied du Vésuve. Le prince royal conduisit les époux à l’autel. Le lendemain mon maître partait pour l’étranger.

Je revins à Naples avec l’épouse de mon maître. Oh ! c’est alors que je fus à même d’apprécier ses vertus et son amour pour Alphonse. Fuyant le monde et ses plaisirs, nous allions souvent visiter le saint ermite qui l’avait bénie ; nous restions dans sa retraite, et lorsque la mer était calme et limpide, la princesse allait s’asseoir sur ses bords ; elle interrogeait les oiseaux voyageurs qui venaient du couchant ; elle leur communiquait ses paroles d’amour pour qu’ils allassent les redire à son bienaimé.