Page:La Variété, revue littéraire, 1840-1841.djvu/252

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 216 —

passé ! » Fragiles fleurs que sa main a cueillies, enivrez mes sens ; nuages incertains qui souriez à notre joie, resplendissez encore ; légères chansons des feuilles, riantes mélodies que s’apprennent les oiseaux, redites toujours : Ils furent heureux !… Mais hélas ! vainement j’ai voulu vous revoir, ô rayons évanouis ; vainement mon âme s’est élancée dans les profondeurs infinies où dorment les souvenirs ; l’abîme s’est fermé devant elle. Seuls, quelques échos égarés répétaient faiblement : Ils furent ! ils furent heureux ! »

La nuit avait surpris le rêveur, et ce ne fut qu’au tintement prolongé qui annonçait la prière qu’il sortit de sa léthargie extatique.

— Toujours le dernier quand il s’agit de prier Dieu, lui dit aigrement Pistochi.

— Ce vieux loup cervier ne s’appaisera jamais, reprit à demi-voix Logroscino. Ah çà, tu tiendras l’orgue aujourd’hui.

— Pourquoi ?

— Ah ! c’est vrai, tu ne sais pas la nouvelle : nous chantons une messe chez le roi, et le maître veut que ce soit toi qui nous accompagnes.

— Je n’ai rien préparé.

— Parbleu ! tu improviseras.

— Sais-tu à quelle heure est la cérémonie ?

— À minuit, c’est une fête royale…

La litanie était finie, et tous les élèves se rendirent à leur cellule pour se préparer à l’exécution de l’office.

À minuit, la chapelle du roi de Naples était éblouissante de lumière, le cardinal archevêque et tout le haut clergé du royaume, revêtus de leurs habits sacerdoteaux, s’apprêtaient à célébrer les saints mystères. Bientôt les galeries furent remplies de toute la haute noblesse napolitaine, des femmes magnifiquement parées augmentaient la pompe magique de la