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Heureux qui peut dormir ! — Sa rapide nacelle
À travers les écueils fend la houle rebelle.
Lui bannit le sommeil quand il arrive au port.
Il n’a point soupçonné les vents ni la tempête ;
Et les fleurs du chemin qui couronnaient sa tête
Ont encor leur fraicheur quand il touche le bord.

Mais malheur à celui que réveille l’orage !
Malheur ! Autour de lui s’épaissit le nuage ;
Il descend et le couvre ainsi qu’un noir linceul.
La nuit se fait terrible et tout son corps tressaille.
À chaque foudre, il sent son âme qui défaille,
Comme un enfant dans l’ombre abandonné tout seul.

Adieu tout cet Éden qu’il bâtissait sur terre !
Adieu son ciel d’azur et sa molle atmosphère,
Et les bruyants éclats de son joyeux festin !
Au lieu de tout cela c’est la nuit ténébreuse,
C’est la vague dréssant sa crinière écumeuse
Quand nul ami n’est là pour lui tendre la main.