Aller au contenu

Page:La Variété, revue littéraire, 1840-1841.djvu/323

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 287 —

Un front où pour toujours ma lèvre avait posé
L’adieu mortel… un front que mon cœur épuisé
Reconnut pour celui de ma douce Marie !
Frère ! un parfum tomba dans mon âme tarie,
Et je restais muet, immobile, troublé,
Craignant que l’ange encore ne se fût envolé !…
Tout surpris de bonheur, et le visage pâle,
Je contemplai long-temps sa grâce virginale ;
Puis une voix bien chère exhala ces accents
Qui me venaient empreints d’un ineffable encens :

— « Que la paix du Seigneur descende sur la terre !
« Que le céleste amour s’épanche avec mystère
» Sur les fronts inclinés et sur les cœurs flétris !
« Que leurs chemins brûlants soient des sentiers fleuris !

» — Tu pleures, Stéphany : vois, et contemple celle
» Qui loin du bord terrestre a déployé son aile.
» Le Seigneur a brisé notre fragile amour,
» Mais si notre bonheur a passé sans retour,
» Doux ami, son image en ton cœur reposée
» Jusqu’au dernier réveil doit charmer ta pensée.
» Pleure sans amertume, et souviens-toi toujours
» De l’espoir enchanté de nos jeunes amours ;
» Souviens-toi, Stéphany, des ivresses naïves
» Dont notre double aurore a brillé sur ces rives,
» Et quand l’heure viendra de me rejoindre aux cieux,
» Qu’elles aient ta poussière et tes derniers adieux ! »

— Le silence tomba comme un poids sur mon âme
Et des cierges mourants l’ombre voila la flamme.

REHDI.

Pardonne, ô mon ami ! j’ai voulu, moi t’aimant,
Te ravir sans éspoir à ton secret tourment,