Page:La Vie littéraire, I.djvu/336

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dans les derniers mois de sa vie, la muse pudique, la douce hôtesse de Luciennes, la charmante madame Laurent Lecoulteux.

Cette dame, la Fanny du poète, était comme on sait, la fille de la belle madame Pourrat, dont Voltaire avait vanté la grâce et l’esprit. Or, Fanny, pour lui laisser son nom d’amour et d’immortalité, Fanny avait une sœur, la comtesse Hocquart, qui vécut assez longtemps pour apporter son témoignage aux générations nouvelles. Cette dame a dit d’André, qu’elle avait souvent vu chez sa mère et sa sœur : « Il était à la fois rempli de charme et fort laid, avec de gros traits et une tête énorme. »

C’est précisément ainsi qu’il nous apparaît sur le portrait que Suvée peignit à Saint-Lazare, le 29 messidor an II. Mais à l’idée de cette tête énorme et de ces gros traits, M. Gabriel de Chénier se fâcha tout rouge contre madame Hocquart et contre « l’éditeur critique de 1862 et 1872 », qui avait recueilli le propos de cette dame. Sans s’arrêter à une maxime du poète qui écrivit dans le canevas de son Art d’aimer cette pensée consolante : « Les beaux garçons sont souvent si bêtes, » le zélé neveu crie à la calomnie : « Tout le monde sait, dit-il, qu’André était beau ! » Et il veut le prouver en citant ces lignes d’une lettre que lui avait autrefois adressée le général marquis de Pange : « J’ai connu votre oncle ; J’ai retrouvé ses traits en vous, dès le premier moment que je vous ai vu. »