Page:La Vie littéraire, I.djvu/373

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transcrire. Chacun de ces versets répond à un chapitre du roman nouveau. Chacune de ces maximes est un baume et un électuaire pour une des plaies que l’habile écrivain a montrées. N’est-il pas merveilleux que l’Imitation, composée dans un âge de foi, par un humble ascète, pour des âmes pieuses et solitaires, convienne admirablement aujourd’hui aux sceptiques et aux gens du monde ? Un pur déiste, un doux athée peut en faire son livre de chevet. Bien plus, je sens par moi-même que ce délicieux écrit doit être mieux goûté, du moins dans quelques-unes de ses parties, par ceux qui doutent ou qui nient que par ceux qui adorent et qui croient. En effet, le solitaire dont c’est l’ouvrage alliait à de célestes espérances une sagesse humaine que l’homme de peu de foi est particulièrement apte à goûter. Il connaissait profondément la vie ; il avait pénétré les secrets de l’âme et ceux des sens. Il n’ignorait rien du monde des apparences, au milieu duquel nous nous débattons avec une faiblesse cruelle et des illusions touchantes. Il connaissait les passions mieux que ceux qui les éprouvent ; car il en savait la vanité définitive. Ses sentences sont des joyaux de psychologie dont les connaisseurs restent émerveillés. C’est le livre des meilleurs, puisque c’est le livre des malheureux. Il n’est pas de plus sûr conseiller ni de plus intime consolateur.

Ah ! si le héros de M. Paul Bourget, si le jeune poète René Vinci avait relu, chaque matin, dans sa