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LA VIE LITTÉRAIRE.

plusieurs ainsi équipées. Il en est chez lui deux entre autres, les Hypocrites et le Châtiment de l’avarice, dans lesquelles Molière trouva quelques traits qui ne déparent ni son Avare ni son Tartufe. Le grand homme fit au cul-de-jatte en le pillant beaucoup d’honneur. Encore l’avare espagnol de la nouvelle a-t-il un air picaresque assez plaisant : « Jamais bout de chandelle ne s’allumait dans sa chambre s’il ne l’avait volé ; et, pour le bien ménager, il commençait à se déshabiller dans la rue, dès le lieu où il avait pris la lumière, et, en entrant dans sa chambre, il l’éteignait et se mettait au lit. Mais, trouvant encore qu’on se couchait à moins de frais, son esprit inventif lui fit faire un trou dans la muraille, qui séparait sa chambre de celle d’un voisin, qui n’avait pas plutôt allumé sa chandelle que Marcos (c’est le nom de l’avare) ouvrait son trou et recevait par là assez de lumière pour ce qu’il avait à faire. Ne pouvant se dispenser de porter une épée, à cause de sa noblesse, il la portait un jour à droite, et l’autre à gauche, afin qu’elle usât ses chausses en symétrie. » Je conviens avec Racine que ce Scarron écrit comme un fiacre. Mais il sait peindre. Voici, par exemple, un trait bien jeté : Notre avare est amoureux. Il rentre au logis fort troublé, mais encore attentif à ne rien perdre. « Il tire de sa poche un bout de bougie, le pique au bout de son épée et, l’ayant allumé à une lampe qui brûlait devant le crucifix public d’une place voisine, non sans faire