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Page:La Vie littéraire, I.djvu/98

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LE CAVALIER MISEREY.

lage et de leur brutale rupture, voilà tout ce livre ; en somme, rien que de la littérature construite sur la vérité. »

J’entends bien, mais il reste à savoir ce que c’est que la vérité et si celle de M. Abel Hermant est la bonne. Nous savons déjà que cette vérité n’est pas la vérité du colonel du 12e chasseurs. Si les lions savaient écrire, si le colonel du 12e faisait un roman sur son régiment, il n’y pas à douter que ce serait tout autre chose que le Cavalier Miserey. Je ne crains pas d’affirmer que ce roman ne serait pas naturaliste. J’ai dit que le Cavalier Miserey l’est. Il l’est tout à fait. On ne doit pas entendre par là qu’il soit brutal ; il semble plutôt doucereux. L’auteur a évité les grossièretés dans un sujet où on en rencontrait à tout propos ; car les chasseurs ne sont pas des demoiselles et le langage des casernes ne ressemble point à celui des salons. M. Abel Hermant ne nous apporte de l’argot des cavaliers qu’un écho adouci. Mais son livre est jeté tout entier dans le moule du roman nouveau. Chaque morceau, repris à part minutieusement, est traité selon la formule. Les descriptions, entrecoupées de bouts de dialogue, se succèdent avec une monotonie dont le lecteur éprouve, je crains, quelque fatigue. Elles sont précises, sans beaucoup d’éclat. Il y a des petits paysages aux endroits où les romanciers ont coutume d’en mettre. Bien que courts, ils sont trop longs, puisque Miserey et le régiment ne les voient pas. Bref, on sent partout la facture, et j’ai