Page:La Vie littéraire, II.djvu/170

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haines, les outrages, les périls. Enfin, il fallut ou fuir comme Prodicos, ou mourir comme Anaxagore. Le poète de la philosophie quitta Athènes et alla chercher auprès d’un tyran cette liberté que la démocratie ne lui donnait pas. Il mourut dans la demeure royale d’Archélaos.

Voilà qu’insensiblement j’ai conté la vie d’Euripide. Je ne vous dis pas, comme celui qui montre la lanterne magique, que si c’était à recommencer je vous la conterais de même. Je crois, au contraire, que je la conterais d’une façon un peu différente. Je ne dirais plus qu’Euripide a été athlète et peintre parce qu’en réalité on n’en sait rien. Une pierre antique nous le montre incertain entre deux femmes représentant, l’une la Palestre, l’autre la Tragédie. Mais il faudrait savoir si cette pierre est antique et si elle représente vraiment Euripide, et enfin si le graveur ne s’est point inspiré d’une légende. M. Heuzey, avec sa science sûre et charmante, nous le dirait. Moi je ne saurais. On montrait à Mégare des tableaux peints, disait-on, par Euripide ; mais disait-on vrai ? Certes, il faut avoir la manie de conter pour conter des histoires aussi incertaines que celle-là. Comme j’aurais bien mieux fait de renvoyer simplement le lecteur à la belle introduction que M. Henri Weil a mise en tête d’un choix de sept tragédies d’Euripide ! C’est là que parlé la science. Mais à l’exemple des Grecs, j’aime les contes et je me plais à tout ce que disent les poètes et les philosophes. La philosophie et la littérature, ce sont les Mille et une Nuits de l’Occident.