Page:La Vie littéraire, II.djvu/369

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est difficile de se tirer avantageusement. Voyez tous les amoureux de Racine, Pyrrhus, Bajazet, Hippolyte, également pris entre deux amours qu’ils ont inspirés : leur position est très délicate, parfois même un peu ridicule, et ils passent de durs moments. M. d’Épinoy est moins innocent qu’Hippolyte et moins excusable que Pyrrhus, mais enfin il n’aime plus la princesse de Chagres et il aime Juliette, qui pardonne. Ce n’est pas là une conversion, car, comme me le confiait l’autre jour un très aimable vieillard, ce sont toujours les mêmes qui sont amoureux. Mais, quand ce serait une conversion, je ne la reprocherais pas à M. Octave Feuillet. L’auteur de M. de Camors aime à couronner par l’expiation ou le repentir ces fautes du cœur qu’il excelle à décrire. Quand bien même on sentirait là un peu trop l’artifice poétique et l’arrangement moral, je ne m’en plaindrais pas. Il m’est fort agréable, au contraire, que ces aventures profanes finissent, comme les récits des pieux légendaires, par le triomphe définitif du bien.

Ce n’est pas une idée médiocrement philosophique, certes, que celle de la rédemption finale des créatures. Et les dénouements heureux, les conclusions morales de M. Octave Feuillet sont irréprochables au point de vue symbolique. Le Divorce de Juliette n’est qu’une élégante esquisse, mais on y retrouve la main du maître. Je ne parle pas aujourd’hui de Charybde et Scylla, qui est imprimé à la suite : ce proverbe renferme en quatre scènes une spirituelle satire de nos lycées de filles et de l’enseignement supérieur qu’on y donne aux petites