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Page:La Vie littéraire, II.djvu/392

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Jeanne n’est faite que de poésie. Elle est sortie de la poésie populaire et chrétienne, des litanies de la Vierge et de la légende dorée, des merveilleuses histoires de ces épouses de Jésus-Christ qui mirent sur la robe blanche de la virginité la robe rouge du martyre. Elle est sortie des sermons fleuris dans lesquels les fils de saint François exaltaient la pauvreté, la candeur et l’innocence ; elle est sortie de la féerie éternelle des bois et des fontaines, de ces contes naïfs des aïeules, de ces récits obscurs et frais comme la nature qui les inspire, où les filles des champs reçoivent des dons surnaturels ; elle est sortie des chansons de la terre des chênes, où vivaient d’une vie mystérieuse Viviane et Merlin, Arthur et ses chevaliers ; elle est sortie de la grande pensée qui fit épanouir la rose de feu au-dessus des portails des églises ; elle est sortie des prophéties par lesquelles les pauvres gens du royaume de France pressentaient un avenir meilleur ; elle est sortie de l’extase et des larmes de tout un peuple qui, dans les jours de misère, vit, comme Marie d’Avignon, des armes dans le ciel et n’espéra plus qu’en sa faiblesse.

Elle est pétrie de poésie, comme le lis de rosée ; elle est la poésie vivante de cette douce France qu’elle aima d’un miraculeux amour.