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Page:La Vieuville - Essai de psychologie japonaise, 1908.djvu/33

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Je n’ai pas vu que leurs succès à la guerre les aient rendus outrecuidants, aucun ne m’en a parlé directement, et ils ont à peine répondu à mes questions polies sur leur rôle personnel dans ce grand drame. Mais j’ai noté l’intérêt profond, passionné, qu’ils prennent à tous les souvenirs de l’épopée de Mandchourie, leur regard toujours impassible et terne se teintait d’enthousiasme concentré, de quelque chose d’indéfinissable qui ne cherchait pas à s’exprimer mais qui me donnait à réfléchir pour les guerres futures. Le quelque chose qui fait qu’il n’y a pas eu de prisonniers japonais. On n’a pas la sensation qu’on leur fait plaisir en visitant leur pays et en s’y intéressant, ils ont plutôt l’air de se méfier de ce qu’on vient y faire. Les marchands sont obséquieux dans les magasins pour étrangers, fort dédaigneux dans les boutiques purement indigènes. Les hommes qui traînent les rikshas ne sont pas de relations plus agréables que les cochers de fiacre ailleurs, les domestiques aussi négligents et âpres au pourboire que partout. Ils ne sont pas bons polyglottes ; la plupart parlent anglais, pas très bien. On dit qu’ils parlent mieux le français : aucun n’a saisi l’occasion naturelle que je lui offrais de le prouver.