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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/225

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

Alors, après un massage réparateur, il faut lui larder la peau des organes de mille coups d’aiguille, et piquer à tour de bras dans les chairs de la cuisse ; ce n’est qu’au bout d’une bonne heure de cette affreuse gymnastique qu’il redevient un homme ; il me saisit alors, et apaise sa fringalle. Ça lui coûte chaque fois cinquante francs.

La première fois, j’avais peur de lui faire mal et je n’osais enfoncer l’aiguille. Mais il se fâchait, et pour me montrer, il saisissait le petit instrument et se plantait à grands coups trois pouces de fer dans les muscles du bassin.

Chose curieuse, il n’y a jamais aucune trace de sang, et les piqûres, bien que cruelles, ne laissent aucune cicatrice. C’est sûrement de l’hystérie.

Mon « colonel » s’indigne de me voir habiter ce sale trou de la rue Saint-André-des-Arts ; il m’a proposé de meubler pour moi un joli petit entresol ou un premier étage, dans le quartier de la Madeleine, rue Pigalle ou rue Blanche. Je n’ai pas dit non, et pour cause… Je me souviens trop de la misère que j’ai endurée et de mes regrets alors que, chez Cécilia, les vieux me proposaient des petits hôtels.