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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/248

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

les honneurs ; puis, tout redevint calme et la vie continua sa course échevelée.

Le testament du mort me faisait un sort enviable : 10.000 francs de rentes viagères ; en outre, tout ce que contenait mon appartement devenait ma propriété. J’étais riche. J’allais pouvoir vivre en femme honnête, enfin.

Ah, bien oui ! On n’attendait que la mort du colonel pour m’accaparer ; le surlendemain des obsèques, c’était déjà chez moi un défilé de viveurs et de sales vieux disposés à prendre la succession du défunt. J’eus beau essayer de me défendre ; ce fut inutile. Je suis trop veule, trop lâche, pour résister, et je devins la maîtresse de tout le monde, sans savoir pourquoi… pas par plaisir, bien sûr !

Au bout de quinze jours, je faisais la noce comme avant et on ne parlait plus du colonel que pour s’en moquer…

Mais j’étais à bout de forces. Tout de même, il y a des limites ; je souffrais réellement.

D’insupportables courbatures me laissaient brisée et pantelante sur ma chaise-longue.

J’avais de l’oppression, je toussais continuellement, j’avais de la fièvre. Un jour, je vis du rouge sur mon mouchoir.