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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/40

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

bonne et gentille avec moi ! Pauvre femme, pauvre petite duchesse ! Toujours souffrante, presque continuellement étendue sur une chaise-longue, elle passe de longues heures à broder une interminable tapisserie rouge et noire. Je garde ses deux enfants, deux garçons un peu turbulents, un peu rosses même, et pourtant affectueux. Quant au grand-duc, mon Dieu, quel homme ! Quelle brute, plutôt !

Un géant, le grand-duc Alexandre Ivanovitch, mais un géant terrible ! Énorme, immense, large comme une futaille et haut telle une tour, avec des mains en battoirs aux gros doigts rouges couverts de poils et des pieds monstrueux. Roux, barbu, piqué de la vérole, le nez écrasé, les lippes charnues et tombantes, de gros yeux bleus durs et cruels sous une broussaille jaune… Avec cela, une voix creuse, brutale qui jette les ordres ainsi que des coups de fouet.

Tout tremble, dans le palais, lorsque le maître est là. La duchesse se fait plus petite sur sa chaise-longue, elle se pelotonne, elle se diminue ainsi qu’un pauvre oiseau effarouché ; les garçons, Serge et Alexis s’enfuient