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Page:La chanson de Roland - traduction 1911.djvu/43

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 « Sire beau-père ; vous devez m’être bien cher
Pour m’avoir fait confier l’arrière-garde.
Charles, le Roi qui tient la France, n’y perdra
Que je sache, ni destrier, ni palefroi,
Ni mule, ni mulet qu’on puisse chevaucher.
Il n’y perdra ni roussin, ni cheval de somme
Qu’on n’ait auparavant acheté à coups d’épée. »
Ganelon répond : « Vous dites vrai, je le sais bien. »


LXI

Quand Roland apprend qu’il sera à l’arrière-garde,
Plein de colère, il s’adresse à son beau-père :
« Ah ! manant ! homme de méchante race !
Tu croyais que je laisserais tomber le gant
Comme tu as laissé tomber le bâton devant Charles. »


LXII

Le comte Roland interpelle Charlemagne :
« Donnez-moi l’arc que vous tenez au poing.
Je suis bien sûr qu’on ne me reprochera pas
De le laisser tomber, comme fit Ganelon
Pour votre gant droit quand il reçut le bâton. »
L’Empereur reste là, tête baissée.
Il tourmente sa barbe et tord sa moustache,
Et ne peut s’empêcher de pleurer.


LXIII

Après lui, arrive le duc Naimes.
Il n’y a pas à la cour de meilleur vassal ;
Il dit au Roi : « Vous l’avez bien entendu.
Le comte Roland est en grande fureur,
On lui a attribué l’arrière-garde
Et vous n’avez pas de baron qui la prenne à sa place.
Donnez-lui l’arc que vous lui avez présenté