Page:La chanson française du XVe au XXe siècle.djvu/282

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MA MIE

Air : Ne raillez pas la garde citoyenne.


Chanson, ma mie, est une bonne fille,
Qui se souvient des siècles d’autrefois ;
Ses gais flonflons, son œil brun qui pétille,
Ont conservé la gaîté des Gaulois.

En son honneur, Brennus planta la vigne
Qu’il rapportait, dit-on, des champs romains ;
Il comprenait que le vin seul est digne
Par ses glouglous d’inspirer des refrains.

Que ton nom soit : Carmagnole ou Lisette,
Ou Marseillaise, ou bien Mimi-Pinson ;
Qu’importe à moi ! Belliqueuse ou coquette
Sous ton bonnet, je te revois, chanson.

Souvent, ma mie, ivre, je t’ai surprise,
Vidant les brocs d’un capiteux clairet,
Qu’un gros bourgeois ou qu’un chantre d’église
Venait t’offrir au fond d’un cabaret.

Combien aussi sous la verte tonnelle
N’as-tu pas ri de la fleur d’oranger,
Qu’on effeuillait pendant la ritournelle
D’un fin couplet rimé par Béranger !

Et puis encore, ô ma chanson, je t’aime.
Quand tu reviens l’œil émerillonné
D’un long souper à huis clos, en carême,
Où le plaisir a bien cotillonné !

Dans les prés verts, j’ai vu ton âme éprise
S’épanouir au doux parfum des fleurs,
Et l’ouragan se transformer en brise
Pour t’apporter les suaves senteurs.