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à déposer leur statue dans un coin de rue quelconque, nous n’y pourrons rien, et, du reste, nous n’y mettrons plus la moindre entrave, l’essentiel étant que toute équivoque soit dissipée. Nous savons, pardieu ! fort bien, messieurs, que vous n’emprisonnerez pas le vaste génie de Balzac dans le moule de votre bronze, et qu’après toutes vos glorifications il nous restera tout entier à glorifier. N’est-il pas de ces gigantesques qui montrent les plus hautains piédestaux petits, de ces immortels pour qui les marbres les plus impassibles sont encore éphémères, de ces radieux, de ces divins que, seule, l’admiration peut doter d’une statue, tout idéale, et qu’elle sculpte dans de la gloire !

Joseph CARAGUEL.

LES GRANDES AMANTES

Les adultères ont pour leurs jeunes amants
Des tendresses de mère et des soins de nourrice,
Et la nuit, sur leurs fronts inspirés et charmants,
Comme au front des enfants, leur main se pose et glisse.

Leur étreinte savante a d’exquises douceurs,
Et l’éphèbe aux ardeurs novices et câlines
Croit toujours faire un rêve, et voir de grandes sœurs
Le bercer mollement sur leurs blanches poitrines.

Dans leurs splendides bras de reines, il s’affaisse
Vaguement fasciné par la longue caresse
De leurs grands yeux tout pleins de douce autorité ;

Et dans son cœur soumis leur féconde tendresse
S’épanche longuement, et, jusque dans l’ivresse,
Garde l’illusion de la maternité.

H. PAUTHIER.