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Ce jour-là, ils furent tout seuls sur les mûriers, car Bôte et le père Louis s’occupaient de la fauchaison des sainfoins et des trèfles.

Métalli, piqué de l’œstre de Vénus, eût bien voulu… Allons donc, dans les champs !… au soleil !… Non, non, la nuit……

Et prenant Perlette par la taille, il lui murmura quelque chose dans un baiser.

— Non, non ! lui disait-elle.

— Si, c’est convenu !

Et le soir, en brassant la feuille, comme ils étaient restés seuls quelques instants :

— C’est entendu, lui dit-il encore ; il lui murmura les mêmes paroles.

— Non, non, fit-elle, rougissante.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Le lendemain Métalli, en retrouvant Perlette de retour de la feuille, la regarda en souriant.

Elle le regarda en dessous, moitié souriante, moitié fâchée encore.

Il comptait la trouver toute fanée comme la fleur quand l’a trop caressée le soleil, jamais pourtant l’aurore n’en trouva de plus fraîches.

Il s’approcha d’elle, la prit dans ses bras et elle lui rendit son baiser… un vrai, en le regardant dans le fond des yeux.

— Est-ce que tu m’en veux encore ? lui dit-il.

— Non, non, murmura-t-elle en le pressant bien fort sur son cœur.

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Elle avait dit, la veille, qu’elle s’en irait. Maintenant elle voulait rester toujours, toujours !

Au décoconnage, voyant qu’on n’avait plus autant besoin de ses services, elle s’offrit à rester en demi-paie, puis pour rien, tant elle se trouvait heureuse de l’amour de son Métalli.

La Riette étant tombée malade, Perlette resta pour aider aux moissons, puis pour les vendanges, et enfin pour les effeuilles.

Et pour finir, elle devint la femme de Métalli. D’aucuns disent : sa gouvernante, tant seulement.

Et des enfants ? En eurent-ils beaucoup ? Il faut le croire.

Si vous êtes curieux d’être éclairés sur ce point, allez faire une excursion dans ce charmant village qui a nom Châteauneuf-d’Isère et le demandez au secrétaire de l’état-civil.

Louis GAY.