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serait-il exposé, d’après cela, à rencontrer aujourd’hui la même résistance patriotique au moment de traiter le même sujet ? J’aime à croire qu’il n’en est rien, car nous nous plaçons ici exclusivement sur le terrain du droit, sur lequel aucun Portugais éclairé ne refusera de nous suivre. Au surplus les intérêts économiques du Portugal ne seraient pas plus compromis que sa souveraineté par le nouvel ordre de choses.

L’Angleterre, la Hollande et la Belgique, que j’ai indiquées comme devant concourir à l’œuvre civilisatrice avec la France et le Portugal, seraient-elles moins bien disposées ? C’est peu vraisemblable. Elles n’ont pas, comme cela se rencontrait pour deux d’entre elles dans l’affaire du canal de Suez, des colonies importantes ni un grand courant commercial déjà créés dans les parages auxquels la voie navigable donne accès, et avec lesquels elles redoutaient de voir leurs communications interceptées. Toutes, sous ce rapport, se trouvent sur un pied d’égalité, et elles n’auraient pas de motifs particuliers pour se montrer plus difficultueuses les unes que les autres.

Ces cinq États formeraient donc un premier noyau, autour duquel d’autres puissances viendraient certainement se grouper avec empressement, et le protocole resterait ouvert pour celles qui, dans la suite, se décideraient à les imiter.


Dans l’hypothèse que l’Institut sera, lui aussi, favorable à ma proposition, dans quelle mesure et de quelle manière lui appartiendra-t-il de travailler à ce qu’elle aboutisse à des conséquences pratiques ?

Je me permettrai de vous rappeler, pour vous mettre sur la voie de la réponse à faire à cette interrogation, un paragraphe de nos statuts, que nous avons trop négligé jusqu’à présent, et qui fournit une indication pour le cas actuel. Il est dit, dans l’article premier, que « l’Institut a pour but de favoriser le progrès du droit international » par divers moyens, entre autres « en poursuivant la consécration officielle des principes qui auront été reconnus comme étant en harmonie avec les besoins des sociétés modernes. » Je souhaite donc qu’après nous être mis d’accord sur la manière dont la question du Congo doit être résolue, nous usions de toute notre influence, pour amener les gouvernements intéressés à se mettre à l’œuvre. À cette fin, nous ne devrions pas nous contenter de leur transmettre nos vœux, mais, comme le veulent nos statuts, nous aurions à « poursuivre » ce résultat, c’est-à-dire à recourir, s’il le fallait, à des démarches instantes et réitérées.

Ne perdons pas de vue que le temps presse. La situation se compli-