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Page:La sainte Bible selon la Vulgate traduite en français, avec des notes par J.-B. Glaire. Nouvelle édition avec introductions, notes complémentaires et appendices par F. Vigouroux (1905).djvu/1074

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18. Des insensés même me méprisaient, et lorsque je les avais quittés, ils médisaient de moi.

19. Mes conseillers d’autrefois m’ont en abomination, et celui que j’aimais le plus s’est tourné contre moi.

20. À ma peau, après que ma chair a été consumée, se sont collés mes os, et il n’est resté seulement que les lèvres autour de mes dents.

21. Ayez pitié de moi, ayez pitié de moi, vous du moins, mes amis, parce que la main du Seigneur m’a touché.[1]

22. Pourquoi me persécutez-vous comme Dieu, et vous rassasiez-vous de ma chair ?[2]

23. Qui m’accordera que mes paroles soient écrites ? Qui me donnera qu’elles soient tracées dans un livre,[3]

24. Avec un style de fer et sur une lame de plomb, ou qu’elles soient gravées au burin sur la pierre ?[4]

25. Car je sais que mon Rédempteur est vivant, et qu’au dernier jour je ressusciterai de la terre ;[5][6]

26. Et que de nouveau je serai environné de ma peau, et que dans ma chair je verrai mon Dieu.

27. Je dois le voir moi-même, et non un autre, et mes yeux doivent le contempler : c’est là mon espérance ; elle repose dans mon sein.

28. Pourquoi donc maintenant dites-vous : Poursuivons-le, et trouvons une parole fondamentale contre lui ?[7]

29. Fuyez donc à la face du glaive, parce qu’il y a un glaive vengeur des iniquités ; et sachez qu’il y a un jugement.

  1. Job 19,21 : Saint Grégoire dit que Job appelle encore ses amis ceux qui l’accablent par leurs injures, soit afin de les obliger par ce terme de tendresse à user d’une meilleure conduite à son égard ; soit pour s’exciter lui-même à regarder leurs injures comme utiles à son salut (Greg. Moral., LXIV, c. 23).
  2. Job 19,22 : Pourquoi… vous rassasiez-vous de ma chair ? Pourquoi me calomniez-vous ou dites-vous du mal de moi ? Cette image se retrouve, sous des formes plus ou moins différentes, dans toutes les langues, quoique nous ne soyons pas habitués à la forme hébraïque. Un passage d’une lettre de Machiavel à Julien de Médicis permet de se rendre bien compte de cette figure de langage. « Je vous envoie, Julien, quelques grives… Si vous avez autour de vous quelqu’un qui se plaise à me mordre, vous pourrez lui en jeter une aux dents : en mangeant cet oiseau il oubliera de déchirer son prochain… De ma pauvre chair, mes ennemis tirent de bonnes bouchées. »
  3. Job 19,23 : Un livre. C’est ainsi que porte la version grecque. À la vérité, l’hébreu lit le livre dans ce passage ; mais dans un des endroits parallèles, comme Isaïe, 30, 8 ; Jérémie, 30, 2, il n’a pas l’article déterminatif.
  4. Job 19,24 : On gravait des inscriptions sur le métal et sur la pierre dès une haute antiquité dans le pays que Job habitait.
  5. Job 19,25-27 : Presque tous les Pères ont reconnu dans ces paroles de Job une profession de foi très claire à la résurrection des corps, et dans les premiers siècles de l’Eglise, après les persécutions, de pieux chrétiens ont fait graver sur leurs tombeaux cet acte de foi comme une expression de leur propre croyance.
  6. Job 19,25 : Mon Rédempteur. Ce Rédempteur est, selon le sentiment commun des Pères et des interprètes, le Fils de Dieu, qui doit juger tous les hommes à la fin du monde.
  7. Job 19,28 : Une parole fondamentale ; littéralement une racine, un fondement de parole, une parole radicale.