Aller au contenu

Page:Labé - Œuvres, t. 1-2, éd. Boy, 1887.djvu/114

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
100
SONNETS.


Et tant le pleur piteus t’a moleſté,
 Que commençant quelque ſon delectable,
 Tu le rendois tout ſoudein lamentable,
 Feignant le ton que plein auoit chanté.
Et ſi te veus efforcer au contraire.
 Tu te deſtens & ſi me contreins taire :
 Mais me voyant tendrement ſoupirer,
Donnant faueur à ma tant triſte pleinte :
 En mes ennuis me plaire ſuis contreinte.
 Et d’un dous mal douce fin eſperer.

XIII.

Oh ſi i’eſtois en ce beau ſein rauie
 De celui là pour lequel vois mourant :
 Si auec lui viure le demeurant
 De mes cours iours ne m’empeſchoit enuie :
Si m’acollant me diſoit, chère Amie,
 Contentons nous l’un l’autre, s’aſſeurant
 Que ia tempeſte, Euripe, ne Courant
 Ne nous pourra deſioindre en notre vie :
Si de mes bras le tenant acollé,
 Comme du Lierre eſt l’arbre encercelé,
 La mort venait, de mon aiſe enuieuſe :
Lors que ſouef plus il me baiſeroit.
 Et mon eſprit ſur ſes leures fuiroit.
 Bien ie mourrois, plus que viuante, heureuſe.