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fin de roman

— Mais oui, je l’ai vue comme je te vois. Je suis allé à Valleyfield dimanche et je suis entré à son magasin pour acheter une boîte de cigarettes. Elle vieillit, tu sais.

Luce regardait tour à tour le nouveau venu et Mérou d’un air étonné et ce dernier avait pris une expression extrêmement embêtée.

— Alors, fit soudain Luce d’un ton ironique, en s’adressant à son ami, tu n’auras pas besoin d’un vêtement de deuil.

Les deux autres la regardaient sans comprendre.

— C’est une farce qu’il avait faite il y a une minute, fit la petite répondant ainsi à l’interrogation peinte sur la figure de Rosalba et de son ami.

Après cela, la conversation languit un peu puis Mérou se leva, disant : « Je regrette de vous laisser, mais j’ai quelqu’un à voir sans faute ce soir ». Et il sortit.

Comprenant qu’elle avait été jouée, moquée, exploitée, Luce laissa éclater sa mauvaise humeur. — Hein ? Pensez-vous qu’il a pris un air bête lorsque vous lui avez parlé de sa mère ? Il m’avait justement annoncé qu’elle venait de mourir, qu’il lui fallait la faire enterrer et s’acheter un habit de deuil !

— Ah ! c’est un drôle de type, fit l’ami de Rosalba. Ça m’a indigné lorsque sa mère m’a dit qu’il lui avait emprunté cent piastres et qu’ensuite, il n’était jamais reparu chez elle. C’est comme pour sa femme. Une fois qu’il a eu mangé l’argent qu’elle avait reçu de ses parents, il l’a abandonnée avec son enfant.

— Comment, il est marié ! s’exclama Luce, la stupeur peinte sur la figure.