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LES ROSES

jour et la vie des hommes est très brève aussi, mais des moments comme celui-ci valent une éternité de célestes félicités.

Je me lève, fais quelques pas et contemple les rosiers qui encadrent la maison blanche, là, devant moi. Ces rosiers proviennent du jardin de ma mère, aujourd’hui submergé par les eaux du canal de Beauharnois. Je les ai arrachés de la vase où ils étaient condamnés à périr et les ai transplantés autour de ma maison. Maintenant, ils forment comme un collier de roses à la retraite où je vis les jours de ma vieillesse. Un souvenir ému me vient au cœur et se mêle à mon admiration pour ces fleurs. J’évoque le souvenir de Celle qui m’a donné le jour, qui a pris soin de mon enfance, qui a été une mère d’une bonté et d’un dévouement incomparables et qui dort aujourd’hui dans la terre. Les rosiers de son jardin prolongent sa mémoire et sont pour moi comme une dernière caresse.

Ô roses de mon jardin vous êtes ma joie !

Des roses, la petite maison blanche et la calme rivière qui coule lentement vers le fleuve, que peut-on demander de plus à la vie ?