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DEVANT LE FOYER

ment unis. Nous vivons là des moments dont nous aimerons à nous rappeler lorsque la vie sans cesse changeante nous aura séparés. Et c’est ainsi que j’évoque des figures amies qui, dans le passé, ont pris place avec moi devant ce foyer et que les hasards de l’existence ont éloignées. Je songe à cette si charmante jeune fille qui, légère, ailée, souriante, après avoir franchi la barrière, s’approchait de la maison en dansant et en sautillant comme une grive. Où êtes-vous aujourd’hui, Marion ? Et cette autre si blonde et si jolie qu’on était séduit en la voyant. Pensez-vous encore quelques fois à nous, Henriette ? Combien d’autres avec qui nous avons passé des minutes dont le souvenir nous émeut. Je regarde ma chère compagne à côté de moi, mon fils et sa femme, le délicieux visage de l’enfant blonde aux grands yeux bleus assise sur un escabeau et dont le sourire illumine notre maison et nous réjouit le cœur. Je ne désire rien de plus.

Au dehors, il fait noir, il fait froid, la pluie ruisselle, mais dans notre retraite, devant le foyer aux flammes claires, nous imaginant pour le moment à l’abri des coups du sort, nous nous sentons infiniment heureux.