V.
HAQUE soir invariablement, en sortant de l’école
les garçons arrêtaient à la boutique de
forge. C’est là qu’ils avaient leur meilleure récréation
de la journée. Quelques-uns regardaient le
père Dupras ferrer un cheval, ou, le bras passé sur
le manche de son soufflet, activer le feu tout en fumant
la pipe et en racontant les nouvelles du rang
aux fermiers du voisinage. D’autres grimpaient sur
le toit d’une petite remise attenante à l’édifice et se
poursuivaient. D’autres encore, jouaient à la clef
ou couraient parmi les tombereaux neufs sentant la
peinture fraîche, les herses aux dents aiguës et les
charrues à réparer. Ces jeux finissaient toujours par
un concours à qui pisserait le plus haut, et le côté
ouest de la bâtisse subissait ainsi chaque jour un
arrosage qui dessinait sur les planches une série
d’ombres chinoises.
La Scouine dont le penchant à la délation s’accusait déjà, porta ces faits à la connaissance de l’institutrice. Comme résultat, les écoliers subirent une sévère remontrance et furent tous gardés en retenue une demi-heure durant après la classe. Les garçons se promirent bien de se venger de cette porte-paquets. Quelques jours s’écoulèrent cependant sans que la Scouine fut le moins du monde inquiétée. L’incident paraissait clos.
Un matin, François Potvin annonça qu’il avait capturé la veille, un écureuil et l’avait mis en cage. Cette nouvelle intéressa fort ce petit monde. Plu-