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LE DESTIN DES HOMMES

préférable de la rappeler à Lui. Il sait ce qu’il fait et ce n’est pas à nous, misérables aveugles, de dire qu’il aurait dû agir autrement. Ah ! c’était un cœur simple, docile, tout pénétré de l’amour divin que sœur Sainte-Perpétue. Jamais il n’y avait eu en elle de révolte contre la volonté divine. D’un cœur doux, humble et reconnaissant, elle acceptait tout ce que la Providence lui envoyait. Les vieux avaient grande joie à lire ses lettres et ils les trouvaient bien belles. Même, ils les estimaient plus intéressantes et plus édifiantes que le sermon du curé le dimanche.

C’est une bien grande consolation à la fin de la vie que d’avoir une fille qui écrit de si pieuses choses à ses parents. Une enfant qui ne leur donne jamais le moindre sujet d’inquiétude. Ah ! si toutes les mères avaient des filles comme celle-là, ce serait le paradis sur la terre. D’autres jours, elle exprimait ses aspirations célestes et son amour pour ses parents.

« Dites-vous que, même si nous sommes séparés, je suis heureuse de mon sort et ne le voudrais pas échanger pour rien au monde. Je prie pour vous, mes chers parents, et chaque mois, je reçois la sainte communion à votre intention. Sur la terre, je suis bien loin de vous, mais j’espère que nous serons réunis un jour au ciel. »

Hector, lui, n’était pas porté à la dévotion. En phrases courtes et décousues, il racontait les incidents de sa vie quotidienne. On l’avait envoyé là-bas pour faire la guerre et il faisait la guerre. Avec lui, pas de grandiloquence, pas de récits dramatiques, héroïques. Des faits, des notes. Il parlait de la guerre, comme il aurait parlé du labour, de la récolte, du commerce du foin. Seulement, il avait hâte que cette « chicane » finisse pour retourner au pays. Depuis longtemps il pensait au retour et il se disait