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Page:Laberge - Le destin des hommes, 1950.djvu/198

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MAGASIN DE MODES


Tout à côté de l’édifice de la Coopérative, à droite, était une vieille maison en bois dans la fenêtre de laquelle l’on voyait depuis des années trois chapeaux de femmes, toujours les mêmes, et une feuille de modes illustrant différents modèles de manteaux. Et dans la porte était une pancarte portant ce seul mot : MODISTE. C’était le magasin de la veuve Rendon. Il se trouvait sur l’unique rue du petit village de Lavoie dans les Laurentides. Pas bien élégant ni bien propre à attirer les acheteuses. Jamais il n’avait été peinturé et il avait un air de misère qui s’accordait bien d’ailleurs avec toutes les autres maisons de la localité à l’exception de celle du maire et du presbytère. Lorsqu’une cliente franchissait le seuil de l’établissement, elle se trouvait en présence d’une femme de cinquante-trois ans environ, aux cheveux presque blancs, avec des yeux gris, un grand nez masculin et de longs poils raides sur la lèvre supérieure. Elle avait une figure fanée qui, lorsqu’elle tentait de sourire, prenait une expression désabusée pénible à voir.

Son magasin n’offrait rien de bien tentant pour la clientèle. Sur quelques tablettes, l’on voyait des bas de garçonnets et de fillettes, des chapeaux d’enfants, des serviettes, des soutien-gorge, des articles de toilette : tubes de