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LE DESTIN DES HOMMES

plus haut degré, elle fit immédiatement sa malle et retourna à Lavoie.

Désormais elle était sûre de ne pas mourir de silicose.

Quinze jours plus tard, en feuilletant les pages du journal, elle lut une annonce demandant une surveillante dans un service de santé de la municipalité de Montréal. Comme elle possédait les qualifications requises, elle se sentait toute confiante. Détail intéressant, le salaire était de quinze cents piastres. C’était la chance qui s’offrait. Le lendemain matin, après une course en taxi, elle prenait le train pour Montréal. En arrivant, elle se rendit au bureau indiqué. Comme elle s’y attendait, elle donna une réponse satisfaisante à toutes les demandes d’informations qu’on lui posa. Déjà elle pouvait croire qu’elle allait décrocher la place convoitée lorsque l’officiel qui l’interrogeait lui demanda, juste pour finir, les questions de routine :

— Vous demeurez à Montréal, n’est-ce pas ?

Elle hésita un moment…

— Non, répondit-elle, sentant que la chance la désertait.

— Je regrette, mais il n’y a rien à faire. Les règlements sont formels. L’applicante doit être domiciliée dans la ville même. Autrement vous aviez la position.

Ce fut un coup de massue.


Pendant quelques jours la veuve Rendon resta plongée dans un grand état de découragement. On lui avait refusé la place qu’elle cherchait à obtenir parce qu’elle n’habitait pas Montréal. Vous voulez travailler, vous avez besoin de travailler, mais un tas de chinoiseries, de règlements stupides vous en empêchent.

Que la lutte pour la vie est donc dure par moment !