Page:Laberge - Le destin des hommes, 1950.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

URGEL POURRAUX
HOMME FORT


Lorsque Charles Pourraux, fermier de Saint-Télesphore fut tué par une ruade de cheval dans son écurie, il laissait deux garçons dans la vingtaine et une petite terre de cinquante arpents. Urgel le plus jeune des deux frères n’aimait pas les travaux des champs et la vie à la campagne lui paraissait bien terne et sans agréments. La nature l’avait doué d’une musculature très remarquable. Il était bâti en hercule et était d’une force exceptionnelle. Très fier de son physique, il ne manquait pas une occasion de faire admirer ses biceps et son torse. Le dimanche, il assistait à la messe en arrière de l’église, près du bénitier. Alors, parfois pendant le sermon, il se glissait furtivement au dehors suivi de cinq ou six gars et se dirigeait vers la remise où les habitants mettaient leurs voitures. Là, il enlevait son veston, son gilet, relevait sa manche de chemise jusqu’au coude. « Tenez. » disait-il, « regardez ça ». Et ce disant, il faisait jouer les muscles de son bras. « Tâtez ça », ajoutait-il. « C’est dur comme du fer ». Et les spectateurs tâtaient et reconnaissaient qu’un bras comme celui-là était aussi solide qu’une barre de fer. « Regardez, » faisait Urgel tout fier des compliments qu’on lui adressait et désireux d’en rece-