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Page:Laberge - Peintres et écrivains d'hier et d'aujourd'hui, 1938.djvu/21

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C’est dans ce milieu et sur la ferme où il avait travaillé auparavant qu’il a vu les métiers qu’il a représentés dans ses sculptures. C’est là qu’il a observé toutes ces coutumes particulières à la race canadienne française, c’est là qu’il a entendu raconter toutes ces légendes qui se mélangent et se confondent avec l’histoire.

En 1898, le jeune Laliberté laissa sa campagne pour venir suivre les cours du Conseil des Arts et Métiers à Montréal. Au printemps, il retourna au moulin à carde de son père. Pendant trois hivers, il mit de côté ses outils d’artisan pour venir étudier la sculpture dans la métropole. Vint ensuite une période critique. Possédant le talent, mais manquant de fonds, Laliberté demeura indécis pendant toute une année, ne sachant que faire. Finalement, une souscription publique fut organisée afin de l’aider à aller développer ses dons naturels en Europe. Enfin, en 1902, il partit pour Paris.

Généreusement doté par la nature, doué d’un extraordinaire talent d’observation, et d’une profonde sensibilité, Laliberté a saisi les gestes et les attitudes de ses personnages et il nous les montre réels et vivants. Possédant la sobriété, la simplicité, le don d’émotion et la sincérité d’un Millet, l’artiste a campé les hommes et les femmes des champs avec une vérité saisissante. Le Semeur, le Faucheur, les Scieurs de long, le Vanneur, le Batteur au fléau, le Bûcheron, le Charron, le Tonnelier, le Bêcheur, etc., sont des portraits puissants et fidèles. Ce ne sont pas des images, des simulacres, ce sont des hommes véritables. Ces travailleurs agissent et accomplissent leur tâche devant nous.

Et ce ne sont pas seulement les métiers de la terre que nous montre Laliberté, mais toutes ces coutumes qui sont dans notre tradition et que connaissent tous ceux qui ont été élevés à la campagne : la Bénédiction du Père, la Guignolée, le Chanteur de cantiques, la Croix sur le pain, la Prière en famille, l’Épi de blé d’Inde rouge, la Rente au seigneur, la Criée pour les âmes, Ti-Quenne à la tire, etc.

Pour compléter son œuvre, Laliberté a illustré les nombreuses légendes qui ont pris naissance aux premiers jours de la colonie et que nos ancêtres nous ont léguées : le Sauvage