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Page:Laberge - Peintres et écrivains d'hier et d'aujourd'hui, 1938.djvu/361

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la plus énorme ironie qu’il soit possible de trouver. Ce sont là des pages d’éloquente vérité ou un homme s’affirme.

En 1898 et 1899, après son internement à Sainte-Pélagie, Zo d’Axa publia sous forme de placards des pamphlets qui portaient le nom de Feuilles de Zo d’Axa et là encore, dans une révolte de tout son être et avec des phrases qui crépitaient comme des mitrailleuses, il reprit ses attaques contre les bourreaux de tous genres, vêtus d’hermine ou d’unifor­mes, qui se servent du code et de la loi pour écraser les pe­tits, les humbles, les malchanceux. Généreusement, Zo d’Axa prit la défense des faibles, des opprimés, des malheureux. Et toujours, ses phrases courtes, claires, vigoureuses, cravachaient les oppresseurs. Chaque numéro des Feuilles du hardi pamphlétaire était comme un coup de dynamite qui éclate. Certains de ses articles ont ému toute la France et ont provoqué non seulement des interpellations à la Cham­bre des Députés, mais ont amené des réformes importantes.

Zo d’Axa a été la grande admiration de mes vingt-cinq ans et je garde encore aujourd’hui le culte de sa mémoire. La lecture du Grand Trimard acheté chez un marchand de li­vres d’occasion où j’avais aussi trouvé Seuls et Petiteau, de Francis Poictevin fut pour moi toute une révélation. Pour ceux qui ne sont pas nés esclaves, ce bouquin sera un fulgu­rant flambeau qui leur fera voir bien des vérités et fera écho aux sentiments qu’ils ont dans le cœur.

Le nom de Zo d’Axa résonnait dans mon imagination et les pages de son livre lues dans une fièvre d’exaltation et d’enthousiasme emplissaient mon cerveau de leur tumulte quand, un soir, assistant à une séance de boxe à Saint-Henri, je me trouvai assis à côté d’un grand et solide gaillard à barbe rousse, vêtu d’un pittoresque complet brun et coiffé d’un grand feutre de même nuance. Sur le siège suivant était mon ami le Dr Adelstan de Martigny.

— Laberge, fit ce dernier, laissez-moi vous présenter Zo d’Axa, journaliste et écrivain de Paris.

— L’auteur de Mazas à Jérusalem ? interrogeai-je.

— Lui-même, répondit mon voisin.

Et chaleureusement, je serrai la large et forte main qu’il me tendait.