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VISAGES DE LA VIE ET DE LA MORT

Mariette repoussa dans un coin le bocal de cire et le linge dont elle se servait pour frotter le plancher et, un peu inquiète, monta un escalier pour se rendre au bureau de mère Ste Agathe. Que pouvait-elle avoir à lui dire ? Avait-elle un malheur à lui annoncer ? Non, mais le temps de son noviciat finissait. Probablement qu’elle voulait l’informer qu’elle pourrait sous peu prononcer ses vœux. Elle frappa à la porte et entra.

Maigre, les traits anguleux, la figure très pâle, avec une verrue à côté du nez, mère Ste Agathe assise devant un bureau très simple lisait à l’aide de verres extraordinairement épais le courrier arrivé le matin. Mariette s’avança timidement. Elle voyait sur le mur un christ blanc en plâtre sur une croix de bois noir, dans un coin de la chambre, sur un socle, une statue de la Vierge, devant laquelle brûlait un lampion. Mère Ste Agathe déposa sur le bureau la lettre qu’elle avait fini de lire.

— Mariette, mon enfant, dit-elle, vous êtes ici depuis dix mois comme novice. Je n’ai rien à vous reprocher, mais je crois et j’ai le regret de vous dire que vous n’êtes pas véritablement appelée à la vie religieuse. Votre place est plutôt dans le monde où vous pourrez faire beaucoup de bien par votre bon exemple. Là aussi d’ailleurs, vous aurez du mérite et vous saurez rendre de grands services. J’espère que vous conserverez toujours un bon souvenir de cette maison. Nous ne vous oublierons pas et nous prierons pour vous. Vous pourrez partir après le dîner. Vous réclamerez vos effets à sœur Ste Eulalie. Bonjour, mon enfant.

Mariette avait reçu un coup au cœur. Elle avait penché davantage sa tête continuellement baissée et elle avait simplement répondu comme toujours :