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VISAGES DE LA VIE ET DE LA MORT

goret ne profite pas vite. Il n’est peut-être pas de bonne race, dit-elle un jour à son mari.

Mais voilà que Mme  Bézières est obligée de quitter la maisonnette de campagne parce qu’un nouveau petit Bézières va entrer dans la famille et qu’elle a besoin de soins spéciaux qu’elle ne saurait trouver ici.

Mais avant de partir, Mme  Bézières s’en va trouver une de ses cousines qui habite à quelque distance de là.

— J’ai acheté, lui dit-elle, en arrivant à Chateauguay, un petit goret que j’engraisse pour l’hiver. Alors, comme je suis obligée de retourner à la ville je voulais te le donner à condition qu’aux fêtes, lorsque vous ferez boucherie, vous m’envoyiez la moitié de la viande, du boudin et du jambon.

La cousine a accepté d’après son principe qu’on doit prendre tout ce qu’on nous offre.

Les petits Bézières sont allés livrer le goret. Ils l’ont tellement fait courir qu’il est tout époumoné et a à peine la force de se tenir debout.

Les semaines et les mois ont passé.

Le petit Bézières attendu est arrivé.

Au commencement de décembre, Mme  Bézières a écrit à sa cousine lui demandant quand elle allait faire boucherie et lui recommandant de lui expédier, tel que convenu, la moitié du lard, des rôtis et du boudin.

Pas de réponse.

Elle a récrit.

Alors, la cousine, ou plutôt le mari de la cousine, a envoyé une lettre :

Je vous écri pour vous demandé de nous excusé, mais je n’peut rien vous envoier. Votre cochon était ben malade quand vous l’avé amené chez nous, i avait pas moien