Page:Labiche - Théâtre complet, Calman-Lévy, 1898, volume 03.djvu/280

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vu jouer Geneviève ou la jalousie paternelle ?… Non ?… Eh bien, voilà mon ver !… La jalousie !… Je suis père… j’ai une fille âgée de vingt-quatre printemps à peine… et ils prétendent que c’est l’âge de la marier !… À vingt-quatre ans ! Mais je ne me suis conjoint qu’à trente-huit, moi !… et j’étais précoce !… Alors, ma maison est assaillie par un tas de petits gredins en bottes vernies… qu’on intitule des prétendus, et que j’appelle, moi, la bande des habits noirs !… Car enfin, ce sont des escrocs… Je ne leur demande rien, je ne vais pas les chercher… qu’ils me laissent tranquille… avec mon Isménie !… C’est incroyable !… on se donne la peine d’élever une fleur… pour soi tout seul… On la cultive, on la protège, on l’arrose de petits soins… de gants à vingt-neuf sous, de robes à huit francs le mètre… on lui apprend l’anglais, à cette fleur !… la musique, la géographie, la cosmographie… et, un beau matin, il vous arrive par le chemin de fer une espèce de Savoyard, que vous n’avez jamais vu… Il prend votre fleur sous son bras et l’emporte en vous disant : "Monsieur, voulez-vous permettre ? Nous tâcherons de venir vous voir le dimanche ! " Et voilà !… vous étiez père, vous n’êtes plus qu’une maison de campagne… pour le dimanche ! Infamie ! brigandage !… Aussi, le premier qui a osé me demander la main d’Isménie… j’ai peut-être été un peu vif… je lui ai donné mon pied !… Malheureusement, ma fille veut se marier… elle pleure… elle grogne même… Je ne sais plus comment la distraire… Tantôt, je lui fais venir de la musique nouvelle… tantôt des prétendus difformes… auxquels je donne des poignées de main… les cosaques ! Je les examine, je les scrute, je les pénètre, je leur trouve une infinité de petits défauts… dont je fais d’horribles vices ! et, au bout de quelques jours, je leur donne du balai… poliment. (Regardant la porte à droite.) Dans ce moment, j’attends l’animal qui est arrivé hier au soir… c’est ma sœur qui l’a présenté, celui-là ; il faudra prendre des mitaines, et dorer le manche à balai… Elle est riche, ma sœur… demoiselle