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Contraindre un homme à s’unir avec des gens d’une croyance différente, c’était, aux yeux de Roger Williams, une violation manifeste d’une liberté ou d’un droit naturel ; traîner à l’église celui qui ne croit pas, ou celui qui ne veut pas venir, c’est imposer l’hypocrisie. Personne ne doit suivre ou soutenir un culte contre sa volonté. « Quoi ! s’écrièrent les magistrats étonnés de cette hardiesse d’idées qui devançait de si loin le siècle, est-ce que l’ouvrier ne mérite pas son salaire ? — Sans doute, répondait Roger Williams, mais celui-là seul doit le salaire qui a employé l’ouvrier. »

Par une conséquence nécessaire de la grande et simple vérité qu’il proclamait avec tant de courage, le jeune ministre en venait à demander la séparation complète de l’Église et de l’État, de la croyance et de l’autorité. « Pourquoi, disait-il, choisir exclusivement les magistrats parmi les membres de l’Église. Autant vaudrait choisir un médecin ou un pilote à cause de ses connaissances théologiques, et de son assiduité au service divin ? »

En vain on lui objectait que pour le magistrat c’est un devoir que de garantir de la corruption l’esprit du peuple, c’est un droit que d’arrêter et de punir l’erreur et l’hérésie. Le nouvel apôtre montrait en deux mots que cet argument n’était qu’un sophisme. « Les magistrats, disait-il, ne sont que les agents du peuple, les dépositaires de