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goût de liberté qui commençait à fermenter sourdement. Rien de ce luxe, de ces distractions, de cette pompe, de cette magnificence, ne pouvait exister en Amérique ; il n’y avait pas non plus la guerre pour donner à la nation un intérêt, un but commun. La plantation était une réunion de fermiers pauvres, économes et religieux, ne voyant rien au delà de l’indépendance qu’ils avaient conquise, n’ayant aucun des besoins de la civilisation française, et par conséquent sans autre pensée que de maintenir la liberté, et de la faire régner dans l’État comme dans l’Église. C’était l’Ouest d’aujourd’hui, mais avec un sentiment religieux plus énergique, et aussi avec moins de désirs et moins d’ambition.

On a maintenant le secret de la supériorité politique des colonies américaines ; elles nous devançaient de deux siècles ; seulement, et j’insiste sur ce point, pour éviter une erreur ordinaire, de cet avantage politique, gardons-nous de conclure à la supériorité de civilisation.

La civilisation est un mot complexe et qui comprend des éléments bien divers, les lois, les arts, les sciences, l’industrie, le commerce, un certain goût général, une certaine sociabilité, toutes choses qui peuvent exister séparément et à des degrés fort éloignés chez des peuples différents, et qui concourent chacune pour leur part à former la politesse d’un siècle ou d’une nation. C’est ainsi,